Observatoire des Rythmes et des Temps de vie des Enfants et des Jeunes

Créé en 2014 à l’initiative du Pr. François Testu, resté inflexible sur l’intérêt, démontré par toutes les études, de l’organisation de la semaine en neuf demi-journées – malgré les ambiguïtés politiques issues de la loi de la refondation de l’école – l’ORTEJ (Observatoire des rythmes du temps de l’enfant et du jeune) élargit aujourd’hui son champ d’intervention.

Dans une perspective réelle de démocratisation du système éducatif français, lequel va mal si l’on prend en compte les évaluations internationales PISA, PIRLS ou TIMMS, l’Observatoire privilégie en particulier la réussite scolaire de tous les élèves de l’école primaire, du collège et du lycée.

Dans ce but majeur, l’ORTEJ entend ainsi faire mieux connaître, d’une part, les travaux de chercheurs et spécialistes de l’éducation et, d’autre part, formuler des propositions en direction des enseignants, des responsables et des partenaires de l’école.

 

Il nous paraît important tout d’abord de rappeler les conclusions des différentes recherches portant sur l’attention et la concentration de l’apprenant au cours de la journée et de la semaine :

  • Sur la journée, la fluctuation généralement observée montre qu’après un « creux » de la première heure de classe (entre 8 heures et 9 heures), le niveau d’attention s’élève jusqu’en fin de matinée pour atteindre un pic entre 11 heures et 12 heures. Il s’abaisse après le déjeuner puis s’élève à nouveau plus ou moins, selon l’âge ;
  • cette rythmicité journalière des performances mentales n’est présente que lors d’apprentissages nouveaux. Inversement, lorsque l’élève exécute une tâche de réinvestissement de l’acquis et quel que soit le moment de la journée, sa réussite est constante ;
  • en général, il n’y a pas de corrélation statistique entre les durées de sommeil nocturne et les performances. En revanche, l’arrêt de la sieste entre 4 et 6 ans constitue une des périodes extrêmement critiques dans l’harmonisation des différents rythmes biologiques circadiens ;
  • l’école française est l’une des rares écoles au monde à proposer une journée de congé en milieu de semaine aux élèves des cycles de la maternelle et du primaire ; elle est la seule à proposer la semaine de 4 jours.
  • les meilleures demi-journées de classe ne sont pas les mêmes selon l’âge. L’élève de CP atteint son plus haut niveau de concentration le jeudi après-midi, c’est le vendredi matin pour les élèves des cours élémentaires et moyens.
  • Certains enfants ont leurs journées de congé (mercredi, samedi ou dimanche), «surbookées». À l’inverse, d’autres sont «livrés à eux-mêmes» les jours de congé. Dans ce cas, la télévision constitue l’activité principale pour «passer» le temps libéré.

 

Mais les rythmes psychologiques des enfants sont nettement impactés par l’organisation temporelle du travail parental.

Pour comprendre la réalité de ce vécu scolaire, il faut cumuler les temps passés en classe, lors des trajets, mais aussi celui consacré aux devoirs et leçons. L’analyse des relations entre la journée de l’enfant et la journée de travail parental montre des liens différenciés selon les catégories socioprofessionnelles. Et lorsqu’il n’y a qu’un seul adulte dans le foyer pour élever les enfants, ces derniers ont des journées qui s’allongent significativement. Lorsque l’adulte ne peut prévoir ses horaires de travail ou lorsque ses horaires sont atypiques, l’organisation de vie de l’enfant devient elle-même non prévisible. Enfin, la dilution des frontières entre espace professionnel et espace personnel et/ou familial ont aussi des effets considérables sur la vie de l’enfant

L’ORTEJ s’engage à exploiter quelques pistes pour améliorer la réussite scolaire de tous les élèves, c’est-à-dire pour aller vers une réelle démocratisation de notre école

  • Pour prendre en compte la rythmicité journalière des performances mentales, l’organisation des emplois du temps et du travail des élèves doit privilégier les apprentissages nouveaux dans les périodes favorables et le réinvestissement dans des temps qui le sont moins.
  • Tous les travaux montrent tout l’intérêt d’une vraie mixité scolaire. Si le principe du collège unique est aujourd’hui menacé, nous devons tout faire pour que l’école publique reste l’école pour tous. Il convient donc d’éviter que le système des options ne sélectionne systématiquement les bons élèves. A l’inverse, il faut veiller à ce que les cours de soutien ou les interventions des structures d’aide (RASED – séances d’orthophonie, etc) ne privent pas les élèves en difficulté des temps indispensables d’apprentissage.
  • La pédagogie et la didactique sont les clés essentielles d’amélioration des résultats des élèves. Il convient d’entrer en rupture avec la « transmission des savoirs ». Le savoir ne se transmet pas, il se construit. Faute de formation les enseignants ne réussissent pas à gérer l’hétérogénéité des classes. Or toute connaissance, tout savoir-faire s’appréhende à différents niveaux de difficulté. De même, la compréhension de textes écrits, les savoirs mathématiques ont fait l’objet de recherches trop peu diffusées. Les représentations des élèves dans les domaines scientifiques, historiques et géographiques ont été étudiées et sont connues.
  • Le système de notation français est, pour bon nombre de nos élèves, destructeur de l’estime de soi. La conception même des exercices d’évaluation, souvent sans différenciation ni hiérarchie de difficulté pose problème. Des exemples pris à l’étranger permettraient de réfléchir à cette conception qu’ont les enseignants français.
  • La co-éducation suppose un réel partenariat entre les professionnels de l’enseignement et les parents d’élèves dans leur diversité, y compris les parents éloignés de l’école. Les leçons et devoirs donnés à la maison constituent à ce titre un élément de discrimination dans la mesure où bon nombre de familles ne sont pas en mesure d’aider leurs enfants. Et il n’appartient pas aux parents de réaliser ce travail.
  • Il est regrettable de constater que dans de nombreuses communes, il n’y a pas de continuité entre le travail scolaire et les activités post et périscolaire de la garderie et des centres sociaux.
  • Les évaluations internationales PIRLS, TIMMS et PISA sont régulièrement commentées dans leurs résultats. Mais le contenu, la hiérarchie, l’organisation des exercices donnés ne sont jamais évoqués. Les inspecteurs et les enseignants gagneraient beaucoup à connaître dans le détail ces travaux et les commentaires comparatifs effectués par les spécialistes de ces évaluations. De même, de nombreuses questions sur le sentiment des élèves eux-mêmes quant à leur vécu scolaire et les relations qu’ils entretiennent avec leurs enseignants constituent de précieux renseignements. Pourquoi ni les politiques ni les médias ne s’emparent-ils pas de ces documents ? Et pourquoi ceux-ci ne sont-ils pas traduits en français, au-delà de résumés largement insuffisants issus de la DEPP ?
  • Enfin nous savons tous que le réchauffement climatique et les aléas qui en découlent sont inéluctables. Si les bâtiments administratifs prennent bien en compte ces changements, qu’en est-il des locaux scolaires et des cours de récréation ? N’est-il pas temps d’y réfléchir pour permettre à nos élèves et aux enseignants de travailler dans de meilleures conditions ?

 

Certes l’ORTEJ ne fera pas tout et pas seul. Mais nous avons l’intention, en prenant appui sur les travaux de nos membres et sur ceux des nombreux spécialistes de l’éducation, et avec nos convictions et nos valeurs, de dire, d’écrire, d’intervenir et d’alerter tous les acteurs du monde de l’éducation dans le seul but de faciliter le travail scolaire de nos élèves, de les faire mieux réussir dans leur scolarité et dans leur vie future.